Mettre en œuvre un projet de méthanisation est complexe et doit faire l’objet d’une étude de faisabilité personnalisée. De nombreux paramètres sont à étudier, et en particulier les cinq piliers suivants.
Où implanter le méthaniseur ?
En dehors des équipements de micro-méthanisation installés à proximité immédiate des stabulations, définir l’emplacement d’une unité de méthanisation agricole plus grande et souvent collective n’est pas anodin. Pour les projets d’injection, le site doit être choisi de façon à optimiser le coût du raccordement au réseau de distribution du gaz (géré par GRDF) ou au réseau de transport (géré par GRTgaz). Pour les projets de cogénération électricité-chaleur, la réflexion se fait en fonction du mode de valorisation de la chaleur : dans une infrastructure existante, ou dans un nouveau projet.
Le choix du site doit aussi prendre en compte la proximité des exploitations agricoles impliquées, un éloignement suffisant vis-à-vis des habitations, et le réseau routier nécessaire aux flux logistiques (arrivée d’effluents d’élevage, départ de digestat). La société créée pour l’unité de méthanisation deviendra obligatoirement propriétaire de la parcelle choisie.
Estimer et sécuriser le gisement
La plupart des projets de méthanisation agricole visent à valoriser des effluents d’élevage. Dans le cas de la micro-méthanisation, le lisier frais de bovins est même le gisement quasi-exclusif. Dans les unités plus importantes, des productions végétales peuvent être intégrées afin d’augmenter le pouvoir méthanogène, voire même constituer l’unique gisement. Toutefois, l’objectif n’est pas de mettre dans le digesteur les cultures principales de la rotation (d’ailleurs limitées réglementairement à 15 % du tonnage), mais des cultures intermédiaires à vocation énergétique (Cive) dont le développement peut être renforcé en interculture d’été ou d’hiver.
Selon les projets, d’autres types de déchets peuvent compléter l’approvisionnement : tontes de pelouses issues des collectivités, déchets d’industries agroalimentaires (pulpe de betterave par exemple). Avec l’essor de la méthanisation, un marché des déchets méthanisables émerge, où la concurrence peut s’inviter. Il est donc important de s’assurer de la durabilité et du coût éventuel de son gisement.
Quelle capacité financière des porteurs de projet ?
Le financement des unités de méthanisation repose sur deux sources : l’emprunt bancaire d’une part ; les capitaux propres d’autre part. Les subventions, de plus en plus sollicitées en raison du nombre croissant de projets, doivent être considérée comme « la cerise sur le gâteau ». L’apport de capitaux propres représente en général 10 à 20 % de l’investissement. Il vient du ou des agriculteurs porteurs du projet, ainsi que d’éventuels partenaires dans le cas de projets collectifs. Ainsi, Noriap est en capacité d’entrer au capital des sociétés suivant la volonté et les décisions des porteurs de projet. D’autres partenaires sont susceptibles d’apporter leur soutien comme les syndicats d’énergie ou communautés de communes.
Outre l’apport financier, les partenaires peuvent avoir un rôle facilitateur dans la construction du projet grâce à leurs compétences, ou représenter une garantie auprès des banques, ou encore apporter une caution morale pour défendre l’intérêt d’un projet à l’échelle d’un territoire auprès des riverains notamment (transition énergétique).
La réflexion autour du financement des projets collectifs est donc très importante dès le démarrage, car elle conditionne la gouvernance, ainsi que le partage des risques et de la rentabilité. C’est un choix stratégique pour les porteurs de projet. Il faut noter que des solutions évolutives peuvent être envisagées, avec un retrait progressif ou au contraire une montée en puissance de certains actionnaires.
Plan d’épandage et logistique
Si la question ne se pose pas pour les micro-méthaniseurs dont le digestat remplace le lisier au niveau du plan d’épandage de l’exploitation, le sujet est plus complexe dans les unités collectives. Quelle est la valeur de mes effluents d’élevage et la part du digestat qui me revient ? Qui transporte les effluents des fermes jusqu’au méthaniseur et qui épand le digestat dans les champs ? Faut-il investir dans des équipements ou faire appel à un prestataire ? Faut-il avoir recours à la séparation de phases afin d’exporter la part solide du digestat ? Les choix réalisés auront une influence sur le montant de l’investissement, les coûts de fonctionnement (masse salariale notamment) et le temps de travail consacré par les agriculteurs. Le recours au salariat est incontournable pour la gestion quotidienne des unités collectives, sachant que les exploitants gardent un rôle dans le pilotage et l’astreinte en cas d’alarme.
L’indispensable cohésion du groupe
Les projets collectifs de méthanisation naissent parfois au sein de groupes d’agriculteurs existant et travaillant déjà ensemble, les Cuma notamment. Dans d’autres cas, des agriculteurs ne se connaissant pas, et à la tête d’exploitations variées, peuvent se retrouver autour d’une même table. Or, s’engager dans un tel projet représente un « mariage » d’au moins quinze ans (durée des contrats d’achat de gaz ; vingt ans pour les contrats d’achat d’électricité), auxquels il faut ajouter au minimum trois années de réflexion et de construction du projet.
Au cours des réunions de préparation, la cohésion du groupe et la convergence vers des objectifs communs va progressivement s’installer, à condition que chacun puisse exprimer ses attentes. Il est important que les agriculteurs s’approprient leur projet et soient tous d’accord avec les objectifs.
La vie des unités de méthanisation n’est pas un long fleuve tranquille. Elle connaît des hauts et des bas, et ils devront à certaines occasions se serrer les coudes. Noriap accompagne des projets avec notamment son expérience de fédérer des acteurs. Elle apporte aussi des compétences dans ces dossiers complexes.
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